Les Autres

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Spoiler

Nuit et brouillard

Film à la beauté troublante d’Alessandro Amenabar jouant sur nos peurs les plus primaires. La voix off s’adresse à nous, nous ramenant à l’enfance et aux frousses liées à celle-ci : le noir, la nuit, les créatures cachées dans les placards, les couloirs mal éclairés.

Comme chez Stephen King, l’angoisse et la frayeur naissent d’un semblant de banalité, partant du principe que l’on a plus peur de ce qui est hors champ.

On a à faire à un 6ème Sens inversé, et au final plus réussi. Le film est tout en symbole. La maison est une prison physique, mais aussi la prison intérieure des personnages principaux. On finit par avoir un doute sur certains éléments : la folie réelle ou non de Nicole Kidman (dans son meilleur rôle), la véracité des évènements…On a juste la certitude qu’un lourd secret est présent et pèse sur cette famille.

La peur reste une question de point de vue sur les évènements. L’absence totale d’humour et de recul la rend encore plus palpable, avec une tension permanente. Elle est accentuée par un énorme travail sur la technique : absence quasi totale d’effets spéciaux, énorme travail sur la photographie et sur le son.

La structure du film est malgré tout simple : lieu unique (ou presque), temps court, quasi linéarité de la narration. Le film nous raconte le long cheminement de l’héroïne et de ses enfants vers la lumière. La révélation finale est limpide à chaque visionnage.

Kidman est magnifique en blonde hitchcockienne. Sa manière de scander ses phrases est une partie importante de son rôle, renforçant le côté inquiétant de la chose, la rapprochant du Norman Bates de Psychose.

Intuitions

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Spoilers

Médium bouseux

Sam Raimi joue ici sur son mode sobre, loin de certains tics, et s’entoure d’un casting impressionnant (Hillary Swank, Cate Blanchett, Keanu Reeves, Katie Holmes, J.K. Simmons, Greg Kinnear, Giovani Ribisi).

Après Un Plan simple, il revient au fantastique par un mode moins gore, avec des détails de mise en scène jouant sur la fantasmagorie (comme lorsque Donnie (Reeves) aborde le fils d’Annie, il a comme une aura maléfique, comme un grand méchant loup (au passage, une des scènes les plus flippantes du film)).

C’est d’ailleurs dans cette optique que son personnage est développé (en total contre emploi, à savoir un mari abusif bien bouseux, alcoolique, beauf et très violent). Le traitement du personnage va évoluer au fur et à mesure de l’avancée du film : on voit d’abord ce dont il est capable (les coups sur le visage de sa femme), après son visage et sa voix lorsqu’il se présente sous le porche chez Annie (Cate Blanchett). Raimi préserve la star au maximum par cette technique.

De plus, il agit comme dans Un Plan simple : il filme les gens simples de cette cambrousse sans les prendre de haut ni les juger, malgré le côté très archétypal de ceux-ci (le beauf violent, la petite bourgeoise nympho, le mec beau, cultivé et un peu coincé, le shérif blasé…). Il a également arrêté de mettre ses acteurs au service de sa réalisation, et a gagné en simplicité en faisant l’exact contraire.

Seule la fin avec la résolution de l’intrigue pêche et est la partie la plus faible de l’histoire.

Edward aux Mains d’Argent

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Spoilers

Féerie horrifique

Burton a un goût certain pour tous les personnages marginaux et les freaks. Ce film, inspiré par les films d’épouvante (Frankenstein, évidemment, mais aussi King Kong ou le plus poétique La Belle et la Bête), le film est porté par Johnny Depp. Et on n’imagine personne d’autre que lui dans ce rôle, un enfant dans un corps d’homme.

Véritable conte de fée (les lettres du générique nous mettent tout de suite dans l’ambiance), cette histoire totalement fantastique se veut ancrée dans la réalité, du moins, dans une certaine réalité : celle de la narratrice, Kim (Winona Ryder). Elle nous raconte tout cela alors qu’elle l’a vécue, cela nous ramenant à la transmission orale des légendes.

Burton, fidèle à son style, y introduit des éléments de l’épouvante (clin d’œil à James Whale et Frankenstein, alors que l’ancrage est plus proche de Pinocchio).

Le film se déroule dans une banlieue uniforme et proprette dominée par le château, menaçant (d’abord vu depuis un rétroviseur, puis avec une vue d’ensemble). Nous avons deux mondes qui existent, mais ne se rencontrent pas. La mère de Kim (Diane West) va briser cette frontière inviolée, comme le père dans La Belle et la Bête.

Burton va alors inverser les valeurs : il va faire entrer le quotidien dans le fantastique. En venant en ville, Edward se fait adopter, mais devient prisonnier du système américain.

Mais ce n’est pas qu’un film sur l’exclusion, c’est également une histoire d’amour tragique et romantico-gothique. Edward découvre Kim sur des photographies. Il va alors franchir toutes les étapes de l’état amoureux (sans qu’il ne soit jamais vraiment question de sexe, du moins venant de sa part (c’est un enfant, ne le perdons pas de vue), car dans l’entourage de la famille, il y a une voisine nymphomane). Burton se cantonne beaucoup sur l’état platonique de l’amour.

Mais qui dit amour, dit jalousie. Kim se découvre un amour pour Edward, entraînant la jalousie de son petit ami. Mais cet amour, pour très beau qu’il soit ne peut que rester impossible.

Le film est truffé de pointes d’humour plutôt dues à la maladresse d’Edward, faisant hommage au burlesque et au cinéma muet.

Une scène tranche très nettement avec les autres : le cambriolage raté. Caméra à l’épaule, éclairage terne, parsemé de flashs, changement d’angles de vue, Burton joue avec l’aspect faussement bienveillant de la société.

C’est à ce moment-là qu’Edward comprend qu’il restera à jamais un paria. Ses mains d’artistes (ils taillent les buissons, fait office de coiffeur, sculpte la glace) sont aussi des armes, ses caresses sur Kim deviennent ainsi des blessures. Ce qui n’empêche pas Burton de filmer une magnifique étreinte entre Kim et Edward.

Edward tue Jim (ce qui est la seule scène de violence du film), se condamnant ainsi à l’exil éternel. Il revient au château, redevenant la créature de Frankenstein chassée par les villageois. Il n’a été accepté que le temps de se fondre dans la masse.

Kim fait croire à sa mort, le tuant symboliquement aux yeux des autres. Tant qu’il y aura de la neige, elle saura qu’il est en vie (il crée cette neige en sculptant la glace). Ce film est la grâce et la magie, et cette fin est belle à en pleurer.

MARS ATTACK

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Spoilers

Independance day acerbe

Tiré d’une série de cartes de jeu à collectionner, le film est sorti en frontal avec Independance Day, le nanar interstellaire d’Emmerich. Le film de Burton est lui plus déconneur (avec un caractère volontairement distancié et comique, voire cynique et ironique), et féroce.

Fan de Ray Harryhausen, Burton choisit malgré tout l’animation 3D pour plus de facilité. L’aspect carton-pâte est volontairement conservé, pour aller dans le genre catégorie B à l’ancienne (soucoupes volantes stéréotypées, avec coques scintillantes et lisses).

Pour cela, il mise sur une mise en scène ambitieuse pour moderniser le côté un peu désuet de l’entreprise (l’arrivée dans le Névada est un modèle de mise en scène).En brouillant les pistes, mélangeant le classicisme et le modernisme, il rend l’histoire totalement intemporelle. Il ne cherche absolument pas le réalisme là où Emmerich la jouait un peu trop sérieux (on voit Mars depuis la Terre, il existe un traducteur universel, traduisant même le martien, des gamins expliquent à la CIA comment protéger le Président). Ce qui donne un spectacle très subversif.

Le film est découpé en trois actes distincts : l’arrivée, le contact, la guerre. De ce découpage, Burton tire un outil satirique efficace. On a des portraits outranciers et caricaturaux d’Américains (ultra-communautarisme, avec des groupes fermés les uns aux autres), une intrigue qui évolue au gré des déclarations plus ou moins péremptoires des uns et des autres, chacun étant sûr de détenir LA vérité (un savant, une alcoolique anonyme, le Président des USA, une guide, Tom Jones, un magnat de l’immobilier, un gradé de l’armée), alors que Burton fait tout pour nous montrer qu’individuellement ils se trompent tous. Il met en opposition degré de civilisation et instinct guerrier (où les discours justifient l’absurde). Le Sénat finit par voler en cendres, car les Martiens ont des intentions clairement belliqueuses, bêtes et méchantes. Mais au moins, eux ne se cachent pas derrière de beaux discours de façade.

Burton s’amuse aussi avec les codes du film catastrophe, prenant une pléiade de stars, dont la plupart meurent de manière rapide et souvent très drôle, avec sarcasme et puissance graphique en avant (le Président meurt un drapeau planté dans le cœur, un reporter à l’héroïsme un peu trop exacerbé se retrouve carbonisé, un scientifique transformé en cobaye…). Ce film reste atypique dans la filmo de Burton, car il prend des personnages très archétypaux pour lesquels il n’a aucune forme de tendresse.

Le film est anti-social, gentiment anar, et totalement iconoclaste. L’acte central (le contact) est atomisé de l’intérieur par les Martiens eux-mêmes. Ce qui impacte le dernier acte : ce n’est pas une guerre, c’est un massacre. Jeu de massacre où Tom Jones (mauvais chanteur, et terrible acteur) devient le sauveur de l’Humanité…

LES DENTS DE LA MER

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Spoilers

Sharkploitation

Avec ce film, Spielberg allait créer le blockbuster estival. Il offre une passerelle entre le film catastrophe, le film d’aventures et le slasher movie (le requin jouant le rôle du tueur). La scène d’ouverture porte les thématiques du film. Un jeune y séduit une jeune fille. Celle-ci se déshabille et va se baigner. Le jeune homme, saoul, ne peut pas la rejoindre et crie « I’m coming », ce qui peut se traduire par « j’arrive », mais aussi par « je jouis »… La fille est attaquée par le requin, comme violée par celui-ci. Le jeune homme n’a rien vu et s’endort sur la plage.

La fille a répondu à l’appel du large (l’appel du sexe, de l’inconnu). Le requin est très symboliquement l’état entre l’âge adulte et l’enfance et il va falloir l’affronter. C’est ce qui va arriver à Brody (Roy Scheider), le flic du coin.

Plusieurs éléments étayent cette idée : quand il questionne le jeune homme après la noyade, il lui parle comme à un copain de lycée, il se heurte à l’autorité, il a l’impression qu’on ne l’écoute pas, et quand il prend une initiative (la fermeture des plages), il se retrouve puni. De même, quand il se documente sur les requins, il s’endort sur les cours, comme un étudiant.

Le film se démarque du roman pour pouvoir coller aux thématiques de Spielberg. Ainsi, la liaison entre Hooper et la femme de Brody disparaît, la femme chez lui n’étant quasiment pas un objet sexuel, revêtant plutôt les habits de la mère. Hooper (Richard Dreyfus) devient alors le bon copain de Brody, une espèce de geek avant l’heure.

Le passage de Brody à l’âge adulte se fait par petites touches. Il rencontre donc son pote Hooper, déraciné comme lui. Lors de la mort du fils Kitner, la mère lui ordonne, après l’avoir giflé, d’aller tuer le monstre, donc de se confronter au monde adulte, de tuer l’enfant en lui.

Sa femme lui parle souvent avec un ton très maternaliste, ce qui le met mal à l’aise surtout quand elle le fait en public. Tout comme le jeune s’est pris une cuite en début de film espérant se faire la fille sur la plage, Brody se saoule avant d’affronter la mer, l’âge adulte. Il repousse toujours le moment de cet affrontement. L’attaque contre son fils aîné rend celui-ci inéluctable.

Le film bascule en film d’aventures entre hommes (une des rares fois dans la carrière de Spielberg où la femme est mise à l’écart), ce qui est sûrement la conséquence de la présence au scénario de John Millius. Dans cette partie se trouve un des passages les plus emblématiques du film, et aussi un des plus flippants : la tirade de Quint (Robert Shaw) sur le drame de l’Indianapolis. Ce passage est là pour expliquer de manière efficace et rapide qui est Quint, le personnage le plus ambigu de ce film. Il est l’héritier de tout un pan de la littérature américaine (avec son assurance qui l’entraîne vers l’arrogance) et nous fait inévitablement penser à Achab , le chasseur du Moby Dick de Melville. Pour lui, il n’y a qu’une loi, celle de la nature, et jusqu’ici il la maîtrise. Ce qui le met en opposition frontale avec Brody qui lui représente la loi des hommes. Il va prendre la place de la figure paternelle, étouffant la figure maternelle et la repoussant aux yeux de Brody.

Il en arrive même à se fâcher avec Hooper lorsqu’il se rapproche de Quint. Hooper voit en lui un mec vantard. Tout ceci se passe lorsque le requin est caché. Dès que la bête ressurgit, Hooper reprend le dessus, Brody ne cherchant pas à prendre parti, restant dans le factuel (« We’ll need a bigger boat »).

Comme tout bon film d’aventure, on a ainsi un récit initiatique. Quint veut livrer bataille, mais pas au requin particulièrement. À la Nature en général, car il sent qu’il est en train de perdre la partie (il casse sa radio, coupant tout contact entre eux et le monde des hommes).

Ils sont trois, et représentent ainsi 3 phases : l’ado (Brody), le jeune adulte (Hooper), et l’adulte, le père (Quint). Et les trois se trompent sur la nature du mal qu’ils affrontent, du moins sur la manière de s’en protéger : Quint fait confiance à son bateau, Hooper à sa cage, et Brody aux deux autres hommes. Un meurt (l’adulte), un est blessé (le jeune adulte) et le troisième, l’enfant, doit affronter le mal en face, les yeux dans les yeux, pour le tuer. Pour repartir vers la maison enfin adulte.

LOGAN

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Spoilers

Fin de série

James Mangold livre l’épisode de comics le plus désenchanté et le plus noir de toute une série. On suit la lente agonie du personnage, atteint par le produit que l’armée lui a injecté pour en faire une machine à tuer. Et il va en être ainsi du film, où l’on colle aux basques de celui qui fut Wolverine, indestructible guerrier, et qui est devenu si vulnérable.

La fin du film est portée par des lumières très vives, qui jusqu’alors baigné dans des clairs obscurs (au mieux), ou même carrément dans du sombre.

Le film est porté par un rythme assez lent mais où des poussées d’adrénaline le font basculer dans une fureur assez sauvage (le film est excessivement violent, et même jusqu’à l’overdose par moment).

Le sous-texte sur la découverte de ce qu’est la paternité est vraiment un point fort de l’histoire. Traînant le Professeur Xavier comme un boulet, Logan, qui pour la première fois utilise le nom qui lui avait été assigné dans les comics (James Howlett), ne découvre son attachement à ce dernier que lorsqu’il devra se résigner à sa mort. C’est à ce moment-là qu’il découvre que les liens qui les unissaient étaient des liens quasi-filiaux.

La découverte en parallèle de l’existence de sa fille laisse apparaître des failles que l’on ne pouvait deviner chez lui.

Malgré tous ces points plutôt intéressants, le film tourne un peu à vide dans la deuxième moitié, le faisant apparaître longuet ; C’est dommage, car la matière et les acteurs semblaient faire un bon assemblage. Mais le soufflet retombe un peu vite. Pourtant, par moment on retrouve la fougue qui jaillissait dans un autre blockbuster sauvage, le Mad Max Fury Road de Georges Miller.

Bref, à voir, mais pas indispensable.

SUBWAY

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Métro, c’est trop

Film très daté années 80.

C’est un film sur les délires capillaires : Lambert a une coupe pétard jaune poussin affreuse, Adjani navigue entre brushing BCBG, coupe négligée, et iroquois.

Les dialogues sont du délire de n’importe quoi.

Les acteurs sont totalement en roue libre (la palme à Galabru et Bohringer).

Un homme, Fred (Lambert, au début d’une carrière nanardissime), est au volant d’une Peugeot 205 GTI et passe douze mille fois les vitesses pour essayer de semer sur l’autoroute une Merco lancée à sa poursuite avec 5 hommes à bord. Pourquoi ? On s’en fout, parce qu’en même temps, ce n’est pas le sujet du film. Bon, en fait, le sujet du film, je ne sait pas vraiment ce que c’est.

Il réussit à les semer en se garant dans une station de métro, où toute une vie nocturne existe : des flics qui court après des voleurs à la tire, dont le rollerman (Anglade), vrai Ben Laden des sacs à main. Mais on est chez Besson, et les flics sont bas de plafond, parce que la caricature c’est tellement plus simple, hein….

Fred file rendez-vous à la femme (Adjani) à qui il a volé des documents très importants (une photo d’enfance), et elle va venir, partir, revenir (on n’est pas chez Lelouch, ça va trop vite).

En fait, l’histoire on s’en branle. Fred veut monter un groupe de musique, Adjani voit des feux d’artifices dans le métro (en même temps en s’enfilant des Aspro dans tous les liquides qu’elle trouve (flotte, pinard)), Galabru fait la quête, Bacri fait la gueule, Le Pogham est un bras droit inarrêtable et qui est souvent au téléphone (où on demande Le Pogham), Bohringer vend des fleurs, Anglade roule, et Eric Serra joue de la basse en faisant la gueule.

Un film de Besson au charme certain des années 80, où la fragrance du nanar flotte.

L.A. CONFIDENTIAL

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Spoilers

L’union fait la force

Il y a Ed Exley (Guy Pearce), flic par ambition, capable de balancer ses collègues pour faire carrière dans son idéalisme. Il passe pour un lâche et un arriviste. Il finira par renier toutes ses belles idées et à basculer dans le côté obscur.

Il y a Bud White (Russel Crowe), flic par mémoire pour sa mère tuée sous les coups d’un père violent. Il passe pour une brute sans tête, et ne supporte pas les violences faîtes aux femmes. Il y versera lui aussi, car trop manipulé. Et s’avérera plus malin que ce que les gens pense de lui.

Il y a Jack Vincennes (Kevin Spacey), flic par intérêt. Il bosse comme conseiller technique sur une série télé, et cela est devenu sa raison de vivre, lui ayant fait perdre de vue tout esprit éthique et tout recul sur son boulot.

Ses trois flics vont se retrouver à devoir faire équipe pour s’élever contre la gangrène de la police de L.A. dans des années 50 remarquablement mises en images : la corruption.

Adaptation réussie d’un bouquin très touffu de James Ellroy (pléonasme), le film garde l’essentiel de l’histoire. Il réussit là où De Palma s’est planté avec la Dahlia Noir. Les acteurs sont parfaits, jouant beaucoup sur les fêlures des personnages, les rendant en clair-obscur. Ils ne sont pas tout noirs ou tout blancs, ce qui les rend vraiment intéressants.

Et évidemment, comment ne pas parler du rôle exceptionnel que trouve Kim Basinger dans ce film. Elle est belle, et elle aussi joue sur les fêlures de son personnage avec beaucoup de subtilité.

Un très grand polar, qui va gratter derrière le vernis bling-bling de la cité des anges, préférant les à-côtés noirs et dégueulasses que la lumière rend plus tolérables.

BLADE RUNNER 2049

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Spoilers

No Future

Denis Villeneuve s’en sort pas mal avec cette suite qui pouvait être casse-gueule.

Il y a certaines faiblesses (le flou autour de comment on conçoit un bébé en étant non humain, la fin, un peu bâclée). Mais dans l’ensemble, c’est plutôt pas mal.

Esthétiquement d’abord, car on navigue dans une palette de couleurs cohérentes (grises, puis orangées, avec, comme dans le premier pas mal de zones d’ombre). Techniquement ensuite, car Villeneuve est un excellent réalisateur, même si on peut parfois se dire qu’il se regarde filmer.

L’histoire vaut ce qu’elle vaut, et on n’est clairement plus dans le film noir, comme chez Scott. On est vraiment dans l’anticipation pure et dure. Et elle soulève quelques questions intéressantes. Un être humain peut-il être défini par ses souvenirs, ou y-a-t-il d’autres espèces qui sont capables d’avoir une mémoire ? Et cette mémoire, est-elle réelle ou est-elle ce que nous avons décidé d’en faire ? On est sans cesse face à ce problème, sans qu’il n’y ait vraiment de réponse. Mais les orientations prises pour nous interroger sont très présentes, et s’incluent parfaitement dans le scénario.

Ryan Gosling, en réplicant chasseur de réplicants, est très bon. Il est complètement en marge. Dans ce monde terrestre où ne vivent plus que les humains les moins fortunés (les plus riches sont sur des colonies), son statut d’androïde le met en marge des Hommes qui le regarde comme un être détestable. Et d’un autre côté, les autres réplicants le regarde aussi comme un rebut car il fait un métier méprisable (tuer ses semblables). Sur le fil du rasoir, en sorte (blade runner, en anglais).

Retrouver Harrison Ford fait le même effet que dans Star Wars ou Indiana Jones, on a une petite émotion. Mais ici, son personnage a vraiment de l’épaisseur, et son absence durant toutes ces années (dans l’histoire) se tient et a une légitimité.

Un film au-dessus de la moyenne, loin d’être sans défaut, mais cela était prévisible.

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Spoilers

L’union fait la force

Quand Nolan s’attaque à un genre, autant dire qu’il va chercher à le travailler dans sa moëlle la plus profonde. Ici, avec le film de guerre, on est plus proche de Terrence Mallick et de La Ligne rouge que d’Il faut sauver le Soldat Ryan.

Tout d’abord, sur la forme, une nouvelle fois il nous envoie des images exceptionnelles et un cadrage remarquable. On assiste à une mise en lumière des plages du nord telle qu’on ne peut pas imaginer les voir.

Le scénario fait la part belle à des acteurs inconnus auxquels viennent se mêler des histoires où des acteurs connus jouent un rôle important, mais à même hauteur que ceux des inconnus.

Le fait de voir tous ces destins se mêler pour au final, par un sens du montage une nouvelle fois ébouriffant, les faire aboutir au même moment au même endroit (ou presque), alors que l’on pense suivre plusieurs parties différentes du siège de Dunkerque, est en soi un morceau de bravoure.

Mark Rylance confirme qu’il est difficile de le voir mal jouer dans ses rôles, de même que Tom Hardy. Et Kenneth Branagh quand on lui donne un vrai metteur en scène est le vrai très bon comédien que l’on a découvert il y a une trentaine d’années.

Nolan ne cherche pas le spectaculaire pour le spectaculaire, il l’inclut dans une série d’engrenages conduisant là où il souhaite exactement nous conduire. Il ne s’embarrasse pas avec des dialogues (la première heure est très basée sur les silences, les dialogues n’étant là que pour apparaître dans la bouche d’officiers donnant des ordres ou de soldats exécutant).

Un magnifique film de guerre où passe par moment le lyrisme de David Lean et le sens de l’analyse du monde de Kubrick.